leblogdeMonsieurDupont

Psyko-Land

Mercredi 13 mai 2009 à 1:46

     Ca fait deux ou trois ans que j'ai cette impression qui me colle à la peau, tellement que c'en est devenu le leïtmotiv de ma vie. L'impression que je n'ai plus de temps à perdre, que je n'en est pas assez surtout, comme si j'étais un quinquagénaire qui vient de se rendre compte qu'il est maintenant plus proche de l'heure de sa mort que de celle de sa naissance. Plus que cinquante-cinq à soixante ans à vivre, merde... s'que ça passe vite ! Le but de la vie selon moi ? Il n'y en a pas. La vie n'a aucune raison d'être, elle n'engendre qu'elle-même et ne sert à rien. Comme tout ce qui existe. Mais bon, parti de ce constat "à quoi sert la vie ?" = "Que faire de ma vie?". Ma réponse c'est que j'ai un seul objectif à me fixer : pouvoir arriver vers la fin en faisant un bilan en me retournant sur ce que j'aurais fait et été, sur ce que ma vie aura été, et pouvoir me dire que dans l'ensemble c'était pas trop mal à quelques regrets près. Pouvoir me dire que finalement ça aura été plutôt bon. C'est simple mais en même temps d'une grande ambition je pense.

     Et là qu'ai-je fait pour l'instant, en vingt trois ans ? [...] Une ou deux fiertés personnelles, qui ne parleront pas à grand monde et sans grand intérêt pour le commun des mortels, et que j'oublie d'ailleurs assez rapidement vu qu'elles ne m'apportent pas particulièrement une grande estime de moi-même dans la durée, tout juste une petite satisfaction sur l'instant, quelque chose d'à peine plus tenace qu'un goût de sucré sur la langue qui s'évapore en deux minutes.
     Et donc je me sens opressé par cette idée que je n'ai pas le temps, plus le temps, que je voudrais faire tout ce que j'ai à faire (pas énormément de choses sur ma liste en fait) très vite. Lire tous les bouquins du monde : haem, délicate mission, on fera ce qu'on pourra. Vivre avec la fille de mes rêves : haem, je brûle les étapes, m'enflamme, lui fais peur. Mon envie de faire vite donne envie à mon autre de freiner. Ce qui fait que j'ai encore plus l'impression de manquer de temps. J'ai plus le temps d'en perdre à me tromper moi ! Si je fais des erreurs il faut qu'elles arrivent vite, que je puisse en tirer les conséquences rapidement et passer à autre chose ! Pas le temps de me dire "et si..?". Je veux vivre maintenant, j'ai été trop sage jusqu'à présent, je me sens imprimé d'une date de péremption dans la nuque. Si j'active pas la cadence
je vais mourrir demain et je ne m'en serai pas rendu compte : "Déjà 81ans ? C'est passé vite ! Où est-elle ? Qu'est-ce que j'ai fait de ce que j'aimais ? Qu'ai-je réalisé d'important à ùes yeux ?".

     En même temps je suis le roi de l'immobilisme. Quand on a été le trouillard de service et l'omniprudent par excellent il est difficile de changer. Petit à petit on y arrive, sous la forme de défis qu'on se fixe, qu'on met des jours à réaliser ou parfois des années. Tellement peur de pas faire assez de choses que j'en suis submergé et n'en commence aucune. Ou pas bien.
L'immobilisme c'est nul (<= phrase super, je sais :/). Mais quand on a l'inconscient qui vous dit "ne fais pas un pas en avant c'est trois cents mètres de vide !!!", et qu'on constate effectivement qu'il y a trois cents mètre de vide, il est délicat de se dire que de toute façon si on meurt pas en prenant son pied avec un base-jump, on crèvera de faim. La nature m'a ainsi fait que je doive attendre la fin assis au bord de la falaise. Et ça fait vingt trois ans que je vois des tas de gens faire du base-jump et ils ont l'air plus heureux que moi quand même ! Du coup quand il m'arrive d'en faire, ben j'écarte pas les bras, je plonge la tête en avant et les mains groupées en position de pointe, pour aller à fond les ballons. Je brûle les étapes dans une sorte d'euphorie sans penser aux éventuels dommages collatéraux. 'fin bref, c'est parce que je suis par nature l'opposé d'un fonceur que je suis une tête brûlée parfois.

Par Pas le temps, vraiment ? le Jeudi 14 mai 2009 à 2:07
A force de sceller ses lèvres elle se sentait disparaître.
Parfois elle cherchait quelqu'un à qui arrêter de se taire. Sa sélection était stricte et douloureuse. Lorsqu'elle écoutait un autre parler sans se retrouver en lui elle préférait maintenir le silence que provoquer l'incompréhension. Lorsqu'elle se reconnaissait dans un discours étranger elle choisissait de ne pas l'interrompre ni le poursuivre de peur de répéter le fond en empirant la forme.
Il fallait pourtant bien extérioriser ce tourbillon d'angoisses, de solitude, d'interrogations et de lucidité pour pouvoir le supporter. Sinon, comment contenir tant de désespoir ?
Alors parfois elle écrivait. Toujours à la troisième personne et au passé.
Comme si ces mots qui s'imprimaient sur le papier pesaient trop lourd pour les faire siens. Comme pour se convaincre qu'ils étaient caduques, que tout était résolu.
Pour se donner l'illusion d'une savante compagnie capable de la guider le long du chemin que le temps qui passe la forçait à suivre. Pour se convaincre qu'elle recevait l'attention permanente, bienveillante et inconditionnelle d'un autre être.
Grâce à lui elle n'était pas seule, elle ne disparaissait pas et n'allait dans la mauvaise direction que pour mieux découvrir ensuite la bonne.
Grâce à lui le tourbillon s'immobilisait quelques instants et elle se tranquilisait juste assez pour poursuivre sans vague ni changement. Juste assez pour continuer à disparaître, lentement mais sûrement. De plus en plus lentement. Au début du siècle il lui aurait encore fallu 30 ans en moyenne. Aujourd'hui presque 65. Trois fois plus que ce qu'elle avait déjà parcouru.
Comment renouveler les étapes pour que le trajet ne se fasse pas répétitif ? A force de s'adapter à tout elle s'habituait même aux sentiments que provoque la nouveauté. Découvertes et défis se transformaient en références d'un catalogue d'imprévus qu'elle n'avait plus envie de lire. Quant au connu elle s'efforçait de se souvenir de la dernière fois qu'il l'avait enthousiasmée et d'oublier le temps qui s'était écoulé depuis et continuait inexorablement à le faire.
Comment renouveler les étapes pour que le trajet ne se fasse pas répétitif ? Serait-elle capable de trouver seule un nouvel élan qui rende plus légers ces 65 ans aujourd'hui si lourds ? Un autre pourrait-il le lui insufler ?
Elle s'accrochait tant qu'elle pouvait à ces questions, consciente que si elle permettait au faible intérêt qu'elle avait pour les réponses de disparaître, elle l'accompagnerait dans sa chute. Elle savait que son existence n'avait pas de sens. Mais cela, finalement, ne l'empêchait pas de souhaiter continuer.
 

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